Le 16 mars 2005, des archives concernant « L'Affaire de l'esclave Furcy », mises aux enchères à l'hôtel Drouot, sont achetées par l'État. Elles relatent un procès hors du commun. L'affaire démarre en 1817, à l'île Bourbon, actuelle île de la Réunion. Furcy, un mulâtre, sachant lire et écrire, maître d'hôtel et jardinier d'un notable bourbonnais, se présente au tribunal d'instance de Saint-Denis. Tout en serrant dans sa main la Déclaration des droits de l'homme, il porte plainte contre son maître et entend obtenir sa liberté, une requête légitime puisque sa mère avait été affranchie quand il avait trois ans. Débute alors une procédure qui va durer vingt-sept ans, entrecoupé de séjours en prison, d'exil et de spoliations sous le joug de plusieurs propriétaires. Furcy n'a pour lui que son courage, son intelligence et une patience hors du commun. En 1843, grâce à la défense de magistrats prêts à affronter, au détriment de leur carrière, la redoutable puissance des colons, le voilà, à cinquante-huit ans, enfin libre. Journaliste littéraire, Mohammed Aïssaoui s'est penché sur l'énorme « dossier Furcy », avec une émotion qu'il parvient à communiquer, redonnant vie à celui qui par son acte de révolte non-violent avait enrayé les rouages de l'esclavagisme. À travers cette étonnante bataille judiciaire, restituée avec allant et clarté, transparaît la misère des esclaves, l'arrogance de certains maîtres, blancs ou noirs, tenaillés par la peur de voir tout un système économique s'effondrer. De multiples rebondissements, une documentation abondante et surtout le travail de réflexion qui accompagne ce récit lui donnent un remarquable caractère d'authenticité. Comment ne pas se sentir concerné par la destinée à la fois humble et emblématique de Furcy ? À travers sa voix semble s'élever celle de milliers d'hommes asservis, réduits au silence. Sortir ces vies saccagées « des souterrains de l'Histoire » donner une résonance à leur silence, tel est l'ambition de ce livre-plaidoyer qui pose une infinité de questions. (source : les-notes.fr)